Une photo de Pauline Courreges

Café des Pros

 Pauline, accompagnante dans la périnatalité, formée en haptonomie

Peux-tu te présenter en quelques mots et nous dire ce qui t’a amenée à l’haptonomie ?

Je m’appelle Pauline, je suis maman de deux jeunes enfants, lyonnaise d’adoption et accompagnante périnatale et parentale. J’ai fondé Blooma pour proposer un panel de prestations dédiées au soutien à la parentalité. Parce que lorsqu’on devient parent, on peut vite se sentir perdu face à la tonne d’informations… ou au contraire, abandonné une fois le (sur)suivi de la grossesse terminé. C’est lors de ma première grossesse que j’ai entendu parler d’haptonomie mais, je l’ai découverte « trop tard » pour pouvoir en bénéficier. Alors, dès que j’ai su que j’étais enceinte de mon deuxième enfant, j’ai pris rendez-vous sans hésiter.
Et là, le coup de cœur : cette approche a profondément transformé ma façon d’entrer en lien avec mon bébé, de vivre mon corps, d’accueillir mes émotions, et a renforcé le lien de notre bébé avec son papa.

Ce vécu a été si fort que j’ai eu envie que mon conjoint (ostéopathe) se forme mais ce n’était pas le bon moment pour lui. Alors il m’a dit : « Mais pourquoi pas toi ? »

Grâce à mon diplôme d’éducatrice spécialisée, j’ai pu accéder à la formation, que j’ai suivie pendant un an en parallèle de mon emploi. C’était un peu inattendu, mais tellement juste. Et aujourd’hui, j’accompagne avec passion les familles en pré et postnatal grâce à l’haptonomie.

Une femme allaitant son bébé

Si tu avais carte blanche pour faire une campagne de com sur l’haptonomie dans les maternités, tu ferais quoi ?

Je créerais une campagne à hauteur de parents : simple, sensorielle et douce. Des vidéos immersives de vraies séances, des témoignages de couples, des images qui donnent à ressentir plutôt qu’à expliquer. Je verrais bien aussi des affiches dans les salles d’attente avec des phrases qui suscitent la curiosité :

« Et si votre bébé ressentait déjà votre présence ? »
« Et si le lien avec votre enfant se tissait bien avant la naissance ? »
« Et si vous pouviez soutenir votre compagne dès maintenant ? »

Je mettrais aussi en lumière que l’haptonomie ne se limite pas à un contact avec le bébé : c’est aussi un espace pour se questionner sur sa parentalité, préparer le postpartum, vivre la grossesse autrement, et s’outiller pour l’accouchement.
C’est une vraie préparation affective à la naissance et à l’accueil de l’enfant et surtout il n’est jamais trop tard pour commencer.

À partir de quel moment peut-on commencer un accompagnement pendant la grossesse, et quelle est la place du co-parent ?

Pauline mettant ses mains sur le ventre d'une femme enceinte

L’accompagnement peut commencer dès que les mouvements du bébé deviennent perceptibles, souvent autour du 4e mois de grossesse. Mais il est aussi possible de commencer plus tôt, pour poser les bases du lien, apprendre à créer un espace de
présence à trois. Le rôle du co-parent est central. Il ou elle devient pleinement acteur·rice de la grossesse.
Il apprend à entrer en relation avec le bébé, à soutenir la mère, à co-construire cette triade affective mère-coparent-enfant. C’est souvent dès le début de l’accompagnement que le co-parent réalise concrètement qu’un petit être est là, surtout lorsqu’il sent le bébé se lover dans sa main. Beaucoup de coparent me disent en post natal : « Ce bébé, je le connais déjà » et ça change tout.

Et comme le dit si bien ma formatrice : c’est l’un des seuls accompagnements où le co-parent est indispensable.

Comment te situes-tu dans l’écosystème des pros de la parentalité ? Tu bosses en solo ou en réseau ?

Je travaille de façon indépendante, j’ai un cabinet sur la métropole lyonnaise et je me déplace aussi à domicile. Mais je m’appuie sur un réseau local d’acteurs de la périnatalité : sage-femmes, accompagnantes, ostéopathes, psychologues, sophrologues…
Je crois profondément à la complémentarité des approches.
Quand je ressens qu’un autre accompagnement pourrait soutenir le vécu d’un parent, je n’hésite pas à orienter. C’est en tissant ces liens entre professionnels qu’on peut vraiment prendre soin de la globalité de la parentalité.

Y a-t-il des signaux chez des parents qui devraient alerter un·e pro et l’amener à recommander l’haptonomie ?

Des signaux oui mais on peut faire de l’haptonomie sans forcément avoir de problématique, juste vouloir créer du lien avec son enfant. Cependant, voici plusieurs signaux qui peuvent alerter ou questionner :

  • Des difficultés à se projeter dans la grossesse
  • Une sensation de distance avec le bébé
  • Un diagnostic anténatal qui peut fragiliser le lien
  • Un vécu difficile d’une précédente grossesse ou accouchement
  • Des peurs très présentes autour de l’accouchement
  • Un co-parent qui ne trouve pas sa place

L’haptonomie peut alors offrir un cadre sécurisant, rassurant, qui restaure la confiance, le lien, et le vécu corporel dans toute sa richesse. C’est cette qualité de lien que je cherche à offrir aux familles… et à cultiver chaque jour dans ma pratique.

C’est une pratique exigeante émotionnellement. Toi, comment tu prends soin de ta posture ?

Je m’accorde des temps de pause entre les accompagnements, pour me recentrer et intégrer ce qui a été vécu. Je prends aussi le temps d’échanger régulièrement avec d’autres professionnel·les du secteur. Ces partages nourrissent ma réflexion, me soutiennent, et me rappellent que je ne suis pas seule à accompagner. Je suis convaincue que pour accompagner en profondeur, il est essentiel d’avoir soi-même un espace de soutien. Cela me permet d’être plus disponible, plus ancrée et plus juste dans ma posture.

Une phrase, une personne, un compte qui t’a marquée dans ta pratique et que tu souhaites transmettre à ton tour ?

Deux phrases que j’aime profondément : « Le lien précède le langage » mais aussi « Toucher, c’est parler. » Ces phrases me rappellent que l’essentiel se joue bien avant les mots, dans la qualité de la présence, du regard, du toucher, l’haptonomie quoi !

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